La courbe ci-dessous illustre l’évolution de l’inflation et des taux d’emprunt d’état 10 ans depuis les années 70.
Le constat est assez flagrant :
dans les années 70 et surtout début 1980 l’inflation dépassait les 10% et les taux d’emprunt d’état 10 ans avoisinaient 17%.
et les salaires suivaient cette évolution
On voit ainsi que le salaire d’une profession intermédiaire en 1970 était de 317€ et de 817 en 1980 soit une augmentation moyenne de 10% par an.
Les actions des gouvernements en vue de maîtriser l’inflation ont conduit à une inflation comprise entre 1 et 2% avec des taux d’emprunt d’état 10 ans proche de 0 voire négatif.
Cela s’est traduit par des taux de crédit immobilier aux alentours de 1%, une inflation maîtrisée (moins de 2%) et des salaires en faible augmentation (1.9% en 2021). Taux de crédit, inflation et salaire étaient contenus et sensiblement équivalents. Donc les gouvernements assuraient la stabilité.
Or, la masse monétaire crée pendant la crise du COVID, liée à guerre en Ukraine et probablement à la spéculation généralisée, l’inflation en Juillet 2022 a atteint en France 6.1% (5,8% en Août en raison de la baisse du coût de l’énergie). Alors que les taux de crédit immobilier étaient certes en augmentation mais au jour où j’écris (2/9/2022) toujours contenus ( de l’ordre de 1.75% sur 15 ans).
Alors a-t-on intérêt à s’endetter dans les conditions actuelles ?
Le principe généralement reconnu est que si l’inflation augmente les salaires suivent, ce qui signifie que si j’emprunte à taux fixe, mon taux d’endettement va diminuer avec le temps et donc mon pouvoir d’achat va augmenter.
Prenons un exemple théorique et j’insiste sur ce terme car il est certain que le gouvernement interviendra avant: inflation 6%, taux d’intérêt 2%
Si j’emprunte 250.000 € sur 20 ans à 2% la mensualité hors assurance sera de 1.265€.
Une personne endettée à 33% devra justifier d’ un revenu de 3800€ au moment du crédit.
Si l’on considère que l’inflation reste sur cette base, et que les revenus suivent l’inflation (6%) alors le revenu de cet investisseur serait théoriquement 10 ans plus tard de 6800€. Son endettement ne sera plus de 33% mais seulement 18.6% et donc le disponible (revenu – emprunt) qui était au départ de 2529€ serait 10 ans plus tard de 5.529€.
Cet exemple montre clairement que dans la théorie si les revenus suivent l’inflation, il faut investir …
Et c’est ce qui se passait dans les années 70/80.
D’autant que si la mensualité du remboursement de crédit est fixe, les loyers eux vont augmenter. Donc il vaut mieux avoir un remboursement fixe avec un revenu qui augmente plutôt qu’un loyer qui augmente avec des revenus qui augmentent également.
Mais entre cette théorie généralement reconnue et acceptée et la réalité y at-il un réel écart ?
La vraie question est l’intervention des gouvernements et la mondialisation des échanges qui étaient beaucoup moins développée dans les années 70/80 qu’aujourd’hui.
En faisant simple, les états ne peuvent se permettre d’avoir des salaires qui explosent pour deux raisons :
- la capacité des entreprises à assurer cette augmentation de salaire
- la compétitivité des entreprises au niveau international
Aussi le gouvernement a déjà annoncé une hausse des salaires de la fonction publique de 3,5%, un smic en hausse de 2.01%, et a incité les entreprises privées à négocier des hausses de salaire.
Le premier constat est que les salaires n’augmenteront pas autant que l’inflation. C’est une certitude.
Le second point est de savoir si les entreprises auront les moyens d’augmenter les salaires . Cela n’est pas si sûr ….
Les français seront-ils égaux face à ce nouveau phénomène : Hausse de l’inflation / Hausse des Taux d’intérêt ?
Alors si l’on est salarié avec l’assurance d’une hausse des salaires, on aura toujours intérêt à emprunter aujourd’hui, à figer son taux d’emprunt aux alentours de 2% et année après année on constatera que l’effort d’épargne lié au crédit s’amoindrit au regard de notre pouvoir d’achat (salaire qui augmente).
Mais si l’on est salarié d’une petite entreprise, ou si l’on est dirigeant d’une petite entreprise, avec une incertitude sur ses revenus futurs, l’augmentation des taux d’intérêt va freiner l’acquisition d’autant que le pouvoir d’achat risque de diminuer si les revenus ne suivent pas l’évolution de l’inflation.
ll est probable que la hausse de l’inflation et des taux d’intérêt vont créer un fossé entre les français :
- Ceux ayant des revenus assurés (fonction publique, salariés de grandes entreprises) auront plus de facilité à avoir accès aux crédits car moins exposés aux risques
- Ceux ayant des revenus plus exposés aux risques et c’est le cas des salariés des petites entreprises et de leurs dirigeants.